Le meilleur endroit pour réfléchir.

une mauvaise nuit


Silliana marcha d'un pas rapide comme si elle était pressée, sauf que pour elle s'était son rythme de croisière. Elle offrit son visage à la caresse du vent et poussa un soupir de contentement.

"Ca fait du bien!"

Elle se sentait mieux à présent. Même si le rêve qu'elle avait fait continuait de la travailler.

"Je me demande si c'est... non ! C'est pas possible! Et puis après tout pourquoi pas c'est peut être un souvenir... Pas très plaisant le souvenir, mais c'est possible."

Elle s'assit contre un tronc d'arbre. Ses mains tremblaient à cause du froid, elle les fourra dans ses poches. C'était une journée ensoleillée mais le froid était toujours présent.

"Donc si je reprends mon rêve j'ai encore un inconnu. Mais ... mon autre moi le connaît bien... un ennemi... Oh ! non ! Que tout ça me parait compliqué ! Hum! Dans mon rêve je me suis sentit bizarre à son contact. Est ce que mon autre moi a été amoureuse d'un ennemi... à moins que ce ne fut que du soulagement. Oui mais je ne pourrais pas expliquer la douleur quand..."
Silliana manqua de s'étouffer lorsque lui revint à la mémoire la fin de son cauchemar. Elle avait la respiration saccader, elle mis du temps à reprendre le contrôle de ses émotions.

"Bon, j'ai ma réponse, mais quand même, un ennemi. J'aurais jamais cru ça possible! En tout cas maintenant, je sais pourquoi je me sens en danger chaque fois que j'approche trop prêt d'une flamme... Comme si j'avais pas assez de travail à faire avec mon inconnu!!"
Un nouveau soupir échappa à Silliana.
"Pas moyen que je me remette à réviser! Je me demande ce que je pourrais faire aujourd'hui?"

Premier post

L'après-midi s'annonçait paisible. Pour une fois, Lionel n'avait aucune obligation. Pas de cours, et il ne commençait sa soirée à l'hopital qu'à partir de dix-neuf heure. L'occasion de profiter des rayons de soleil qui réchauffait l'âme du brun, faute de réchauffer son corps. En effet, le vent était froid et la saison des tee-shirt n'avait pas encore commencé. Ca ne saurait tarder.
Vêtu uniquement de noir, de sa veste aux chaussures en passant par son écharpe, ses gants et ses lunettes de soleil, l'historien prit la route du lac de brume. C'était un endroit calme et reposant, le genre de lieu dans lequel Lionel pouvait passer des heures sans s'ennuyer. La beauté du point d'eau et l'atmosphère qui y régnait suffisait à le satisfaire. Chevauchant son vélo, il quitta le campus et roula jusqu'à sa destination. Là, il entama une longue marche.

D'ordinaire, Lionel ne s'arrête jamais de marcher. Il compose juste avec le temps, et repart quand il ne peut plus faire attendre ses autres obligations. Non, rien n'arrêtait normalement l'étudiant.
Rien, sauf eux. Eux, les Elementalistes. Sans savoir comment ni pourquoi, Lionel avait développé une sorte de 6eme sens. Il ressentait l'Energie qui les animait tous, et arrivait en se concentrant à savoir si oui ou non l'individu appartenait à Ordaphe.
Là, il n'y avait pas de doute possible, ça ne pouvait être que la jeune fille aux cheveux noirs, assise sur le tronc, et qui semblait parler seule. Elle dégageait ce truc qui était identifiable pour Lionel, sans qu'il en sache la source. Bien, qu'allait-il faire ? Ne s'était-il pas promis de chercher à vivre en harmonie avec cette partie de lui qu'il avait tenté d'étouffer ?

Quoi qu'il en soit, l'envie d'en savoir plus ne justifiait pas le fait que Lionel aborde une inconnue. Il n'allait pas, comme ça, se jetait sur elle pour la questionner. Il devait réfléchir à la situation avant de soit continuer sa route, soit interpeler la fille sur le tronc d'arbre, qui semblait absorbée par sa conversation avec elle-même.

* Bon, tu tentes quelque chose de discret, et si tu le sens pas, tu tailles ta route *

Bien, c'était assez important pour être signalé, le brun allait de son plein gré entamer la discussion avec une inconnue.

" Penser à voix haute, c'est une idée originale. "

Il affichait un très léger sourire, et sa voix était comme toujours basse, Lionel n'ayant pas l'intention de s'égosiller.

Silliana fut surprise par la voix et encor plus par l'accoutrement pessimiste de l'individu. Néanmoins elle sourit un peu gênée de s'être fait prendre en plein monologue.
Elle se reprit bien vite, et se mit debout pour ne pas être en danger. Son "radar élémentaliste" bien trop sensible ne lui était d'aucune utilité, puisqu'elle ressentait leur présence 24 h sur 24.

"Oui une amie m'a dit que ça permettait d'écarter plus facilement les réflexions stupides."
Elle fit tomber quelques brins d'herbe accrochés à sa veste.
" Mais je dois dire que ça marche pas toujours."
Elle regarda plus attentivement son interlocuteur, elle avait la sensation qu'il hésitait entre la fuite ou la moquerie.

"Pardon j'espère que je ne t'ai pas gêné dans ta ballade."
Elle ne pouvait s'empêcher de le regarder droit dans les yeux afin dit lire un potentiel danger, ne sachant trop que dire tant elle se sentait mal à l'aise.

"Silliana, c'est comme ça que je m'appelle."

A priori, l'intervention soudaine d'un étranger avait perturbé la jeune fille. Elle avait l'air mal à l'aise. mais Lionel n'allait pas se morfondre en excuses pour qu'elle aille mieux. A vrai dire, il ne maitrisait pas très bien les outils de socialisation et son attitude pouvait surprendre. Il resta donc de marbre, tentant tout de même d'avoir l'air un minimum conciliant.
Pour tout dire, le brun eut même un léger sourire lorsqu'elle lui expliqua pourquoi elle préférait penser à voix haute. Elle était maintenant à sa hauteur, et Lionel remarqua qu'elle avait un visage d'albâtre. Ce n'était pas chose courante, surtout dans le sud de la France, mais qu'importe. S'interroger sur l'origine de la couleur de peau des gens, ainsi que plus généralement sur leur physique, n'était pas dans l'habitude de l'étudiant. A ses yeux, un corps ne voulait rien, et les apparences étaient souvent trompeuses. Une demoiselle à l'air avenant pouvait être une vraie harpie, et a contrario, un garçon à l'air abrupt avoir un cœur d'or.

Le malaise s'installa. Était-ce le comportement peu banal de Lionel ou la situation qui en était la cause ?
Une fois debout, l'inconnue fixa son interlocuteur droit dans les yeux. Elle semblait vouloir lire en lui, chose qui restait difficile. Le brun n'aimait pas vraiment extérioriser ses sentiments.

" Non, pour tout te dire, je n'aurais même pas pris la peine de m'arrêter si tu me gênais. "

Il ne disait pas cela méchamment, mais le pensait tout de même. Alors qu'il ressentait clairement l'aura que dégageait la jeune fille, Lionel se demanda s'il n'était pas temps de partir. Il n'avait pas envie d'être hésitant, ni de faire une bêtise ...
Silliana, puisque c'est comme cela qu'elle s'appelait, régla le problème. Il ne pouvait pas faire l'autruche et ignorer une personne qui s'annonce, et était désormais obligé d'engager un semblant de discussion.

" Moi, c'est Lionel. "

Ok, génial, tout le monde s'embrasse ! Mouais, maintenant, il fallait éviter le blanc. Bien, sur de lui, l'étudiant se dit qu'il fallait briser la glace. Il n'avait pas l'intention de mentir, et si comme lui Silliana ressentait les Elementalistes, elle devait se douter de qui il était. D'ailleurs, c'était peut-être même à l'origine du fait qu'elle soit mal à l'aise.

" Pardonne-moi ma question, mais tu n'es pas non plus comme les autres ? "

Silliana faillit exploser de rire lorsque le jeune homme lui expliqua qu'il n'aurait pas pris la peine de s'arrêter. Elle se retint de justesse, seule une lueur espiègle passa dans son regard. Elle commençait à se détendre, il ne semblait pas méchant juste un peu bourru. Silliana ne s'en formalisa pas.
Il se présenta à son tour, tout en ayant l'air un peu en colère. Silliana s'en amusa, elle le trouvait un peu introverti. La situation en était d'autant plus drôle puisque c'était lui qui l'avait interpellée.
Elle était prête à lancer une question quand Lionel la devança, malheureusement elle ne pus se retenir et explosa de rire.

"haha ha! Oui on peut dire ça, après tout chaqu' être humain est unique, sans compter que tu m'as surprise en train de parler toute seule. Pouf! D’accord pour le : « pas comme les autres »."
Une fois de plus, Silliana n'avait pas tout à fait compris le sens de la question, elle suivait sa propre logique. Elle n'imagina même pas ce que sous-entendait son interlocuteur. Il semblait surpris de sa réponse voir même déconfit.
"Quoi ! J'ai dit une bêtise?" Elle ne lui laissa pas le temps de répondre.
"C'est vrai, qu'en ce moment j'en dit beaucoup sans compter que j'en fait tout autant. Mais ne le prends pas mal... Enfin d'après ce que tu m'as dit tout à l'heure ça ne doit pas trop t'affecter."
Silliana prenait de plus en plus plaisir à cette rencontre, elle avait un léger sourire pour mettre en confiance, et la lueur espiègle dans son regard ne la quittait plus.

A en juger par son sourire, tout allait mieux du coté de Silliana. D'ailleurs, elle ne manqua pas d'exploser de rire lorsque Lionel alla droit au but. Quoi ? Le brun n'aimait pas que l'on se moque de lui, et là, il avait juste l'impression d'être "le pigeon de service". Il rougit légèrement, et aurait volontiers rétorqué quelque chose de saignant si la demoiselle n'avait pas fini par répondre ...
Wah. Ok. C'était un ... spécimen. Ce genre de personne qui tirait dans leur originalité tout leur charme, mais qui était souvent aussi à l'origine d'avis tranchés. On aime ou on aime pas, pas de juste milieu.
Lionel était donc sceptique, d'autant plus qu'en écoutant ce qu'elle avait à dire, il finit par se demander si le problème ne venait pas de lui. Silliana était très naturelle, et ne sembla pas accorder d'importance au regard des autres, c'était un fait, mais sa réponse remettait en cause le 6eme sens de l'étudiant, lui qui était certain d'avoir affaire à une Elementaliste. La perspective de s'être encombré d'une Miss Sourire lambda ne l'enchantait pas vraiment ...

Puis tout cela amenait à un problème de fond qui le préoccupait beaucoup plus. Lui qui n'était déjà pas très à l'aise avec tout ce monde élémentaire venait de se rendre compte que l'espèce d'intuition qui s'était développée naturellement, elle qui lui rappelait au quotidien sa nouvelle identité, n'était pas même fiable. A quoi bon s'investir dans une tâche complexe avec si peu d'éléments ? Réfléchir serait la solution choisie, comme toujours, mais à un autre moment. Pour le moment, il y avait Silliana. Un gentil brin de femme énergique, certes, mais pour quelqu'un de calme et de solitaire, on pouvait dire que Lionel avait trouvé son opposé.

" Non, ne t'en fais pas, tu n'as rien dit de grave. "

Mouais, ça, c'est ce qu'il disait. Lui qui avait décidé d'aller droit au but s'était planté, rien de plus. Le pire dans tout ça, c'est que la demoiselle semblait prendre du plaisir à partager un instant avec Lionel. Pour être franc, il n'avait pas l'habitude qu'on lui sourisse, ou plus simplement qu'on soit heureux d'être à ses cotés. C'était assez étrange, cette sensation de partage. Hmm, il préférait tout de même rester seul. Avec lui-même, il n'y avait ni malentendus, ni arrières-pensées. Juste lui.

Bien, que dire maintenant ? Lionel n'avait pas envie de rester sur un échec, et pensa alors à la discussion miracle, qui mettrait peut-être Silliana sur la voie. Le bal de fin d'année, bien qu'il datait, avait été théâtre d'incidents provoqués par les Elementalistes, le brun l'avait appris lors de sa première visite à Ordaphe. Ouais, ok, mais pour aborder le sujet, il fallait encore espérer que son interlocutrice y ait participé. Elle semblait jeune, et c'était l'évènement de Sinespirac, donc l'étudiant pouvait tenter le coup.

" T'as pas bien l'air plus vieille que moi, tu es à l'université ? "

Lionel semblait de plus en plus déconfit au fil de la conversation, Silliana se dit qu'elle n'avait pas du donner la bonne réponse. Elle ne s'en formalisa pas plus que ça. Elle continua de sourire, mais cela commençait à lui peser. Lionel avait subrepticement rougit et elle n'aimait pas ça. Si elle avait connu un peu mieux le jeune homme, elle se serait excusée et l'aurait interrogé plus en avant afin d'obtenir toutes les réponses.
Elle s'abstint de poser les questions qui lui brûlaient les lèvres. C'était pourtant étrange venant de sa part. Cela pouvait prendre son explication dans le fait qu'il semblait fort mal à l'aise et peu sûr de lui. Étant donner que c'était un sentiment qu'elle côtoyait souvent, elle préféra le laisser tranquille. Pour l'instant tout du moins!

Le brun semblait vouloir quelque chose mais quoi. Là était le problème. Silliana ne voulait pas le bousculer mais elle ne pouvait pas non plus deviner.
Elle décida de répondre instinctivement, en espérant que lui viendrait un trait de génie comme il lui arrivait parfois.

"Yep! je suis en deuxième année en biologie appliquée.

Elle fut exaucée, Silliana était en train de se remémorer une conversation ou plutôt une dispute avec un élémentaliste de l'air. Elle passa sa main dans ses cheveux car ils avaient commencé de lui descendre sur le visage. Cela aurait été un poil décevant de ne pas voir Lionel pour la suite de leur conversation.

" Je n'étais pas au bal, je n'aime pas la foule."

Son regard s'était éteint et son sourire était un peu plus crispé qu'avant. La réponse était un peu sèche, elle s'en voulut un peu. Silliana espéra très fort que ses joues ne se soient pas teintés de rose.
En revanche, elle entraperçu une lueur de déception dans le regard de Lionel. Elle avait mis dans le mile.

"Mais j'en ai beaucoup entendu parlé, j'ai peut-être quelques réponses. J'ai une bonne écoute, on me dit presque tout."

Elle avait dit sa dernière phrase en y mettant de l'ironie, se moquant d'elle-même ouvertement. Tout ça en espérant, que Lionel ne s'attarde pas trop sur sa remarque. Elle finit par lui faire un vrai sourire car finalement, elle était passé maître dans l'art de la dissimulation ou tout du moins elle aimait y croire.