Kenen Kuro

" L'histoire des Terres de Fend s'est modelée au cours des âges, mais ce qui nous intéresse ne remonte pas à la création de ce monde, mais à il y a environ une centaine d'années. A partir de là nous pouvons distinguer trois périodes clefs : ce que nous appellerons l'âge d'or, l'ère de Neiji, et l'après l'Eclipse.

Moi et mes compagnons, dont je suis le seul encore vivant malgré mon âge avancé, étions jeunes lorsque nous avons commencés à rassembler ces informations et à faire autant de voyages pour les débusquer. Nous avons fouillés toutes les archives : les disponibles comme les plus secrètes, interrogés les anciens, les survivants, et suivis toutes les pistes qui se déroulaient devant nos yeux … Nos déductions firent le reste, bien qu’elles ne se basent sur rien de bien concret, avouons le. Mais c’est là tout ce que nous avions, et je juge juste ce que je vous révèle à cet instant.

De grandes zones d’ombres subsistent encore. Et à chaque jour qui passe je m’affaiblis un peu plus … Je ferais tout pour que cette mémoire soit conservée à l’abri des yeux des espions qui jadis nous menaçaient, mais vous vous devez de les perpétrer et de lire entre les lignes comme nous l’avons fait.

Au début de notre histoire les Terres de Fend étaient semblables à des contrées vivant entre elles, ne se souciant que peu du commerce extérieur et des contrées étrangères. Le continent, car c'en est toujours un, vivait de croyances anciennes et aujourd'hui mystérieuses ... Une harmonie existait entre les petits peuples et les humains, entre les créatures et les sources de magies existantes.

Lors de cet âge d'or les terres étaient prospères et ce ne fut que lors de la découverte de la navigation - bien qu’hésitante - que l’on commença à s'intéresser au monde et à ses trésors. Les cités se développèrent et naquit Nonaï, la plus belle et la plus grande ville jamais construite ... Le joyaux des Terres de Fend, se trouvant au centre même de toute vie, en parfaite entente avec les domaines environnants dirigés en parfait équilibre par les seigneurs et leurs conseillers, autrefois de sages personnages que l'on nommait les anciens. Les croyances païennes et libres d’antan restaient cependant un moteur de ces civilisations florissantes … Et d'étranges bruits circulaient … Mais l'on n'y prenait pas garde ! Ce n'étaient que des contes pour enfants, balivernes, disaient les uns et les autres.

Mais vint le jour où l'équilibre fut rompu. Ce jour ou l’un des enfants de la cité pervertie se plongea dans les plus vieux livres d'histoire de la cité ... Un vieil adage y disait que toute chose avait son opposé, que tout bonheur se payait, et que toute beauté avait son revers. Il compris que toute cité si grande soit-elle avait ses bas-fonds. Et ce fut à cette époque que l'on différencia enfin les deux faces cachées de la ville : Nekaï la maudite, et Nonaï la glorieuse. L'une abritait la pourriture de ce monde et ne se révélait que la nuit ; tandis que l'autre feignait d'ignorer ce qu'il s'y passait, vivait, et se développait … Toujours plus, toujours plus loin. Les riches s'enhardissaient et enfermaient leurs trésors et leurs familles dans des châteaux imprenables, tandis que dans les villes l'on prônait l'équilibre entre les formes de vies que l'on s’efforçait de ne pas oublier.

L'on avait érigé des temples dédiés aux éléments que l'on avait choisis d'identifier : l'eau, le feu, la terre, l'air, et le métal. Ces cinq éléments étaient - disait-on - la condition sine qua non a la survie de la face ensoleillée du royaume. Certains enfants quelle que soit leur condition sociale naissaient avec des dons que personne d'autre n'avait, chacun rattachés à l'élément qui lui correspondait le mieux. Cela éveilla la curiosité des uns, titilla les autres, et fit devenir suspicieux les anciens.

Ils étaient néanmoins respectés et laissés libres : la nature se manifestait ainsi et l'on la remerciait, au lieu de se tourner vers des Dieux autant hypothétiques qu'ils auraient été inutiles. Un temple unique fut construit, il était le point d'attache de chaque entité, chacun pouvait y prier ce qu'il voulait ou l'élément qu'il voulait en paix. Le temple élémentaire était ainsi, est toujours ainsi, et le sera éternellement …

L'enfant ayant amenées tous ces bouleversements, après avoir pris la parole devant ses pairs, disparu et l'on entendit plus parler de lui. Les informations que nous avons à ce niveau restent incertaines, et là commencent nos suppositions … Certains jeunes manifestèrent des aptitudes plus fortes que les autres. La première génération d’élus venait de d’apparaître, mais bien sur l’on ne le comprit que bien plus tard …

La recherche s’arrête là et l’on ne trouve que bien peu d’informations sur ce qu’il s’est passé ensuite. Nous avons eu beau chercher autant que nous avons pu, ces secrets ne sont sans doute plus connus que de celui qui règle en maître sur les Terres Meurtries … Ceux qui pouvaient constituer la mémoire de ces temps oubliés sont morts et enterrés, depuis le temps que nous nous penchons sur cette histoire, nous n’avons pu que dater ce qu’il a du se passer.

En dix ans la situation se dégrada, et un homme fit entendre ses opinions et devint plus qu’important dans la politique exercée en ces temps là … Ce que l’on peut comparer aujourd’hui à un conseil des anciens où chacun pouvait exprimer librement ses idées, pour aboutir à des projets et des décisions communes qui ne pouvaient plus être contestées. Noir de cœur et d’esprit, il semblait en savoir bien plus qu’il n’en disait … Nous savons qu’une nuit tous les membres des conseils des cités furent abattus en même temps, et d’une même main vengeresse. La cité noire d’Ozanen venait de se montrer en plein jour, et cet homme, Neiji le sage, comme il était appelé avant ces évènements, s’en proclama maître.

Les jeunes élémentalistes qui auparavant jouaient avec leurs éléments et s’amusaient des étranges facultés qu’ils découvraient au fur et à mesure, abandonnèrent toute retenue … Et c’est sans préparation aucune et sans mentors qu’ils se lancèrent à corps perdu dans une bataille qui échoua. Les assassins et espions du Seigneur Noir avaient remplis leur office, et salis leur mémoire et leurs jeunes cœurs. La cité noire fut détruite, mais eux disparurent laissant Neiji libre de ses actes et à même d’étendre ses pouvoirs à des limites jamais dépassées et jamais touchées. Peu connaissent aujourd’hui le nom terrible d’Ozanen, et le sors qui fut réservé à tous ceux qui osaient en prononcer son nom.

La seule lueur d’espoir que nous avons découvert est cruciale : ils ignoraient qu’un élément leur avait échappé ! Celui de l’Ether, celui qui est tout et qui englobe et protège les autres. Alors si les autres se détruisirent en conflits intérieurs et perdirent tout espoir de sagesse, l’élu de l’Ether s’en détacha et l’on pers sa trace à cette époque.

Cela fait maintenant 40 ans que les anciennes créatures ont été confinées au cœur de ces vieux contes que les enfants entendent encore, et que les plus simples manifestations magiques élémentaires ont disparues.

C’est depuis ce temps là que nous soupçonnons l’élu de l’Ether – car nous ne l’avions jamais vu au moment des faits – d’avoir survécu et d’attendre son heure … Bien entendu le Seigneur Noir l’ignore, et s’il venait à l’apprendre sa seule hâte serait la destruction physique et mentale de celui qui est tout. C’est depuis ce temps là que la légende a commencé à circuler, l’on dit que l’on l’aurait entendue la première fois de la bouche d’un vieil homme sur le point de mourir, mais où l’avait-il entendue ? Même nous avons été dans l’incapacité de le découvrir, et peut-être est-ce mieux ainsi … Elle racontait dans quelle situation nous étions et lançait un appel à la rébellion que les partisans étouffèrent bien vite, d’ailleurs aujourd’hui, qui s’en souvient ? "